Loyauté de la preuve et litiges entre associés : précisions de la Cour de cassation
La Cour de cassation, dans un arrêt du 12 février 2025 (Ch. com.), a réaffirmé un principe clé en matière de preuve : une preuve obtenue de manière illicite ou déloyale peut être admise, mais cela ne signifie pas qu'elle sera nécessairement recevable. Cette décision s’inscrit dans la continuité d’une jurisprudence récemment clarifiée par l’Assemblée plénière le 22 décembre 2023 (Cass. ass. plén., n° 20-20.648).
Dans cette affaire, une société avait fait appel à une étude d'huissiers pour obtenir des preuves contre sa gérante révoquée. La cour d'appel avait rejeté ces preuves en raison de leur caractère déloyal. La Cour de cassation, tout en admettant en principe la recevabilité de preuves illicites ou obtenues de manière déloyale, a validé cette annulation. Elle a estimé que la désignation précipitée de l’huissier, en l’absence de circonstances urgentes, portait atteinte au caractère équitable de la procédure.
Un équilibre entre droit à la preuve et loyauté procédurale
La décision souligne que l'illicéité ou la déloyauté dans l'obtention d'une preuve ne suffit pas toujours à l'exclure des débats. Le juge doit mettre en balance le droit à la preuve avec les autres droits fondamentaux en jeu. Une preuve obtenue de manière contestable peut être admise si elle est indispensable à la manifestation de la vérité et proportionnée aux intérêts en présence.
Cependant, dans cette affaire, la Cour a jugé que la procédure suivie par la société pour obtenir ces preuves n’était pas justifiée et qu’elle constituait une atteinte au principe de loyauté.
Conséquences pour les entreprises et les associés
Cette décision illustre les risques liés à l’utilisation de preuves obtenues de manière douteuse dans les litiges entre associés ou entre dirigeants et sociétés. Elle rappelle également que, bien que le droit à la preuve soit un principe fondamental, il ne saurait justifier toutes les atteintes aux règles de loyauté procédurale.
Ainsi, avant d’engager des démarches pour recueillir des preuves contre un associé ou un dirigeant, il est essentiel de veiller à ce que la méthode utilisée respecte les principes du procès équitable. À défaut, ces preuves pourraient être rejetées par les juges, compromettant ainsi la stratégie judiciaire de la partie qui les produit.